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NOTE.


Ce beau gwerz, qui a un cachet d’antiquité barbare et de rudesse sauvage qui rappelle un peu le chant célèbre de Ragnar Lodbrog, est extrait de la riche et très-importante eollection bretonne de feu M. J.-M. de Penguern. Il doit se rapporter à quelque descente des hommes du Nord, Normands ou Saxons, sur les cotes armoricaines, au IXe siècle. S’agit il ici de la destruction du Koz-Guéodet par Hasting, vers l’an 836 ? Je crois qu’il n’est pas trop téméraire de le penser, sans rien affirmer pourtant. « Hasleing, » dit Albert Le Grand, « capitaine des Danois qui escumaient la mer océane, vint cette année (836) avec une grosse armée navale au Bec-Lêguer. Ils assiégèrent et emportèrent d’assaut la ville de Lexobie (Koz-Icodet) massacrèrent le clergé et le peuple et pillèrent les trésors de l’église. » Le Baud dit aussi : « Haston, duc des Danois, persécutant les régions maritimes des Gaules, print Lexovium, et la disrompit. » Et Albert Le Grand ajoute : « Puis les barbares, passant outre, entrèrent dans l’embouchure de la rivière du Jaudy, et posèrent les ancres devant le monastère de Trécor, lequel ils pillèrent et ruinèrent. » L’armée des Bretons les atteignit à peu de distance de là, dans la grande lande de Plourivo, près de Paimpol, et c’est sans doute là que se livra la terrible bataille que le chant breton décrit avec une énergie si féroce : Bars ur blenenn, en bro Arvor.

Ce chant avait sa place naturelle en tête des Chants historiques qui suivront, et non parmi les gwerz un peu fantastiques et merveilleux où je l’insère. J’ai cependant eu mes raisons pour agir ainsi, et je veux les faire connaître.

Je suis devenu tout dernièrement, et conjointement avec M. Hippolyle Du Cleuziou, acquéreur de la collection des manuscrits bretons de M. J.-M. de Penguern, poésies populaires, incantations, conjurations, proverbes, mystères. Lorsque cette bonne fortune m’est arrivée, d’une façon assez inattendue, le plan de ma publication était déjà arrêté, mon manuscrit terminé, ou à peu près, et l’impression allait commencer. J’aurais pu, néanmoins, ou fondre les deux collections en une seule, de manière à ne former qu’un même ouvrage, ou me borner à compléter et à éclairer mes textes avec l’aide de ceux de M. de Penguern ; mon recueil y aurait certainement gagné