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NOTES ET VARIANTES.

Comme l’indique le vers suivant, plusieurs fois répété :


Arsa eta Jannedik, brema pa’z oc’h barnet,

— Or ça, Jeanne, à présent que tous êtes condamnée,


il s’agit très-probablement ici d’une condamnation au bûcher, sur soupçon de sorcellerie, cas très-commun aux quinzième et seizième siècles. Cette ballade est très-répandue dans le pays de Lannion, où j’en ai recueilli plusieurs versions qui toutes concordent assez pour ne pas présenter de différences importantes. Je noterai seulement les suivantes :

Le chef de la famille (ann ozac’h iann), après la conversation curieuse qu’il a eue avec sa fille, en traversant le champ de seigle, dit dans une autre version :

— Arsa eta, Janedik, poent eo monet d’ar ger.
Ha larel, a wir galon, adieu d’ar pardoniou.
Me wel arru awell, glao, dared ha kurunou ! —


— Or ça ! donc, Jeanne, il est temps de retourner à la maison.
Et de dire, de bon cœur, adieu aux pardons.
Je vois venir vent, pluie, éclairs et tonnerres !

Puis, devant le procureur fiscal (les chanteurs disent iskar) il s’exprime ainsi :

— Me’m euz maget ur bugel a oar gwalla ann ed.
Me ho ped, tud ar justiz. da oont d’hi c’homerret.
Me am euz gret ma dever, grit ho hini, mar karet,
Mar karet e profitfet, ha kement’zo er bet. —


— J’ai nourri une enfant qui sait gâter le blé ;
Je vous prie, gens de la justice, de venir la prendre.
J’ai fait mon devoir, faites le vôtre, si vous voulez ;
Profitez, si vous voulez, vous et tous ceux qui sont au monde ! —

Le procureur fiscal fait venir la jeune fille devant lui, et lui dit :

— Demad d’ac’h, plac’hik iaouank, oalet a dric’houec’h vloa.
Gant piou oc’h euz disket ar zorseraj kenta ? —
— Ma oa gant ur paotr denved a oa en ti ma zad ;
Wit beza ur paotr denved, hennés’oa disket mad.
Am c’hasse gant-han bepnoz da welet ar zabbad.
Allas ! me a oa iaouauk, hag am euz profitad !
Pa iz kenta da Baris da deskl ar gallek… etc.


— Bonjour à vous, jeune fille âgée de dix-huit ans.
De qui avez-vous appris premièrement la sorcellerie ? —
— D’un pâtre de moutons qui était chez mon père ;
Et pour être pâtre, celui-là était bien instruit.
Il m’emmenait toutes les nuits au sabbat ;
Hélas ! j’étais jeune, et j’y ai profité.
Quand j’allai d’abord à Paris pour apprendre le français… etc.


Rapprocher cette ballade de celle contenue dans le Barzaz-Breiz (6e édition), p. 135, sous le titre de Héloïse et Aheilard.