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JEANNE LA SORCIÈRE.
SECONDE VERSION.
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   — Quand j’allai premièrement à Paris, pour apprendre le français,
Je ne savais, mon Dieu, que mon chapelet.

   — Mais à présent je suis savante, je sais écrire et lire,
Et, aussi bien que le prêtre, je sais dire la messe ;

   Je sais chanter l’épitre, à la grande messe.
Et consacrer l’hostie, si cela m’était permis. —

   — Dites-moi, jeune fille, avec qui vous avez appris
Le secret pour jeter un sort sur le blé ! —

   — C’est avec un jeune kloarek qui était chez mon père,
Et qui m’emmenait toutes les nuits au sabbat ;

   Il m’emmenait toutes les nuits au sabbat,
Et j’ai appris le mal au lieu d’apprendre le bien.

   Et quand j’arrivais là, je n’entendais rien autre chose
Que la conversation des sorciers et des sorcières ;

   Que la conversation des sorciers et des sorcières.
Et au lieu d’apprendre le bien, j’ai appris le mal ! —

   — Dites-moi, jeune fille, avec qui vous avez appris
Le secret pour jeter un sort sur le blé ?

   Sept lieues à la ronde, il n’a germé aucun grain.
Et aucun enfant nouveau-né n’a reçu le baptême ? —

   — Dites-moi, jeune fille, ce qu’il faut avoir,
Ce qu’il est nécessaire d’avoir pour gâter le blé ? —

   — L’œil gauche d’un corbeau mâle et le cœur d’un crapaud.
Avec de la graine de fougère ramassée la nuit de la St-Jean.

   La première fois que j’employai mon sortilège, pour l’éprouver,
Ce fut dans un champ de seigle ensemencé par mon père ;

   Ce fut dans un champ de seigle ensemencé par mon père,
Et où l’on avait mis dix-huit demi-boisseaux ;

   On l’avait ensemencé avec dix-huit demi-boisseaux.
Et il ne donna pas dix-huit bonnes écuellées !

   J’ai chez mon père un petit coffre-bahut.
Et le premier qui l’ouvrira en aura du crève-cœur !