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  — Seigneur de La Villaudry, si vous m’aimez,
Vous ne me tuerez pas sur l’aire de votre salle ;
Vous ne me tuerez pas sur l’aire de votre salle,
La moitié de mon sang est sang royal. —

  Le vieux La Villaudry répondit
A Ervoanik Prigent, en ce moment :
— J’ai des chiens et des lévriers,
Qui lécheront ton sang à mesure que tu le verseras ! —

  — Seigneur de La Villaudry, si vous m’en croyez,
Vous ne me tuerez pas dans votre maison ;
Conduisez-moi au seuil de l’écurie,
Pour que je voie mon cheval avant de mourir ! —

  Ervoanik Prigent disait,
En arrivant au seuil de l’écurie :
— Seigneur Dieu, mon cheval chéri,
C’est donc ici que nous perdrons la vie ! —

  Quand le cheval blanc l’a entendu,
Il a rompu son attache ;
Il a rompu quatre chaînes,
Et s’est précipité sur le vieux La Villaudry.

  Il a tué sept La Villaudry,
Avant d’arriver au huitième ;
Mais quand il est arrivé au huitième,
Hélas ! celui-là l’a tué !

  Celui-là a tué le cheval,
Parce qu’il avait revêtu une cuirasse.
Ervoanik Prigent et ses richesses,
Tout resta là ! (1)


Chanté par le Petit Tailleur,
au bourg de Plouaret, 1863.


(1) Je ne puis donner aucun éclaircissement historique sur cette étrange ballade, qui est répandue dans tout le pays de Tréguier. J’ignore complètement quel peut être le fait qui lui a donné naissance. Le nom de Prigent est très-commun dans les environs de Lannion : quant à la Villaudry (?) , je ne connais ni famille, ni village, ni manoir de ce nom ; à moins pourtant que La Villaudry ne soit la traduction française de Keraudry. On peut rapprocher Ervoanik Prigent de Iannik ar Bon-Garçon, page 354 de notre recueil : il y a quelque analogie dans la situation générale, et dans quelques détails.