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JEANNE LE GUERN.
PREMIÈRE VERSION.
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I

  — Voilà trois nuits que je n’ai dormi goutte,
Et cette nuit je ne le ferai pas encore,

  En entendant la Vipère
Qui siffle au bord de la rivière.

  Et elle disait par son sifflement
Qu’il n’y a de (bonnes) fiançailles qu’une seule fois :

  Celui qui est fiancé de bon gré
Et qui rompt par caprice ;

  Et qui rompt par caprice,
Fait contrat avec le démon :

  Il est détaché net de Dieu,
Comme la branche de l’arbre ;

  Détaché net du paradis,
Comme le grain de la paille ! —

II

  Comme Jeanne Le Guern allait à Guingamp,
Pour désavouer le sacrement.

  Et danser devant une croix d’argent,
Elle rencontra un jeune gentilhomme ;

  Elle rencontra un jeune gentilhomme,
Mais il était vêtu comme un paysan ;

  Un jeune gentilhomme qui était assez bien,
Si ce n’est qu’il avait des pieds de cheval.

  — Jeanne Le Guern, dites-moi,
A combien de jeunes gens avez-vous fait promesse ?

  — J’ai promis à dix-huit,
Mais je n’ai tenu parole à aucun ;

  Mais je n’ai tenu parole a aucun,
Vous serez mon mari, si vous voulez.

  Il y a dix-huit tailleurs chez moi,
A me faire des habits neufs ;

  A me faire des habits neufs,
Pour me fiancer demain. —

  Et quand les habits neufs furent faits.
Ils ne plaisaient pas à Jeanne Le Guern ;