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  — Avant de sortir de la maison de mon père,
J’ai bien déjeuné. —

  — Petite Marguerite, venez avec moi dans mon jardin,
Pour choisir un bouquet de fines fleurs ;

  Ou bien encore une guirlande,
Pour mettre sur votre pot à lait. —

  — Sauf votre grâce, dit-elle, seigneur,
Je ne songe pas à des bouquets ;

  A Kervezennec il y a du deuil,
Le fils aîné du seigneur est mort. —

  — Et quand même le fils du seigneur serait mort,
Ce n’est pas vous qui porterez son deuil ;

  Ce n’est pas vous qui porterez son deuil,
Mais ceux qui hériteront ses biens. —

  Il n’avait pas fini de parler,
Qu’il l’a prise à bras le corps.

  Une heure et demie, sans mentir,
Ils ont été à lutter tous les deux.

  La dame disait, à la fenêtre de sa chambre :
— Du courage ! du courage ! jeune fille ! —

  — Avoir courage plus longtemps je ne puis,
Mon pauvre cœur ne résistera pas ;

  Mon pauvre cœur ne résistera pas,
Ma ceinture me serre trop :

  J’aime mieux perdre la vie,
Que perdre ma virginité !

  Madame, jetez-moi un couteau,
Pour couper ma ceinture, qui me serre trop ! —

  Un poignard lui a été lancé,
Et elle se l’est plongé dans le cœur ;

  Elle se l’est plongé dans le cœur,
Et elle est morte sur la place !


Chanté par Marie-Anne Le Noan, vieille mendiante
de la commune de Duault.


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