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  L’enfant de cinq ans disait.
En arrivant à la maison :

  — Il n’y a pas d’enfant sur la terre
Qui ait autant que moi de chagrin ;

  Ma mère a été pendue et brûlée.
Et mon pauvre père est lépreux !

  J’ai un petit frère sur la montagne
A qui l’on a bâti une maison neuve ;

  Une maison neuve, peinte en blanc,
Comme celles que l’on bâtit aux lépreux.

III

  L’enfant de cinq ans disait,
En sortant de la maison :

  — Je vais laver sa chemise à mon père,
Il y a trois ans qu’elle n’a été lavée ;

  Il y a trois ans qu’elle n’a été lavée.
Je crains qu’elle ne soit pourrie sur lui ! —

  L’enfant de cinq ans disait,
En arrivant à la porte de son père :

  — Mon père chéri, dites-moi,
Voulez-vous que je vous lave votre chemise ?

  Voilà trois ans qu’elle n’a été lavée,
Je crains qu’elle ne soit pourrie sur vous. —

  Son pauvre père demandait
Alors à l’enfant de cinq ans :

  — Que vous est-il donc arrivé,
Que vous êtes venue si jeune me voir ? —

  — Il n’y a pas d’enfant sur la terre
Qui ait autant que moi de chagrin ;

  Ma mère a été pendue et brûlée,
Et vous, mon père, vous êtes lépreux ! —

  — Et quel crime a-t-elle donc commis,
Pour avoir été pendue et brûlée ? —

  — Un petit enfant a été trouvé dans son lit,
Avec un couteau tout nu dans le côté ;

  Et on le lui a attribué,
Et pourtant elle dit qu’elle n’est pas coupable, —

  Son pauvre père disait
Alors à l’enfant de cinq ans ;

  — Mon enfant chérie, retire-toi.
De peur d’attraper la lèpre, par le trou de la serrure !