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très-laides, et une jeune et jolie. Il eut recours aux animaux qu’il avait obligés sur sa route : les oies lui retirèrent la boule d’argent du puits, les fourmis trièrent et mirent en trois tas les grains mélangés, et le bourdon l’aida à reconnaître la jeune femme des deux, vieilles, en venant voltiger autour de sa tête[1].

Il quitta alors ce château, et vint à Paris. Il devint amoureux de la fille du roi, qu’il aperçut un jour à sa fenêtre. Il pénétra jusqu’à elle en se changeant en épervier, et passa alors toutes les nuits avec elle, non pas sous forme d’épervier, mais bien sous sa forme naturelle d’homme. La princesse mit au monde un fils, et le roi, ayant appris qui en était le père, pensa que ce qu’il avait de mieux à faire c’était de la lui laisser épouser.

Un jour qu’il se promenait au bord de la mer avec un prince qui avait été aussi un prétendant à la main de la princesse, cet homme, d’un coup d’épaule, le fit tomber du haut d’une falaise dans l’eau, et aussitôt la sirène vint et l’emporta dans sa grotte. Il y resta deux ans avec elle. Un jour, elle consentit à l’élever sur la paume de sa main au-dessus des flots, pour qu’il pût jouir, une dernière fois, de la vue de son pays natal. Mais, dès qu’il fut hors de l’eau, il souhaita de devenir épervier, et s’envola auprès de sa femme qui, le croyant mort, allait se marier avec le prince qui l’avait jeté dans la mer. Alors, il fit chauffer un four, et le traître y fut jeté.


Il y a ici mélange de deux fables. Ainsi les trois épreuves me semblent appartenir aux récits concernant le soleil et la Princesse aux cheveux d’or, où on les trouve presque toujours. Ce conte se trouve dans le recueil des frères Grimm, sous le titre de l’Ondine de l’étang. La partie interpolée a du rapport avec la Reine des Abeilles du même recueil. J’ai une seconde version bretonne qui diffère beaucoup de celle-ci.


LE PÈRE QUI VENDIT SON FILS AU DIABLE,
ET LE BRIGAND.


Un pauvre homme vend son fils au diable, pour avoir de l’argent. Pris de remords, il va se confesser au pape, à Rome. Le pape refuse de l’absoudre, et l’adresse à un ermite, dans un bois. L’ermite lui dit d’aller se confesser à un prêtre dans l’église la plus voisine, et de ne pas avouer

  1. Ces trois épreuves me semblent ici une interpolation. L’épisode du triage des grains de différente sorte, que nos conteurs aiment à intercaler dans leurs récits, et que j’ai déjà reproduit, se retrouve dans Apulée, Métamorphoseon, 1. VI. « Ruunt aliæ, superque alise sepedum populorum, summoque studio singulæ granatim totum digerunt acervum. »