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à causer avec un cuistre tel que vous ; mais, puisque je m’y suis condamné, je subirai mon sort jusqu’à la fin.

Jésus-Christ n’a jamais dit, dans le sens que vous attachez à ces mots, que son royaume n’est pas de ce monde. C’est faire mentir l’Écriture Sainte que de mettre semblables paroles en la bouche de ce divin Sauveur. Ce qu’il a dit, c’est ceci : « Mon royaume, c’est-à-dire l’autorité que j’ai, car je suis roi et roi de toutes les nations qui m’ont été données en héritage, n’a pas une origine humaine. Mon pouvoir ne m’a pas été donné par le monde ; il vient d’En-Haut. »

Voilà ce que signifie la préposition latine de. Elle indique l’origine céleste du pouvoir de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et non pas le lieu où il doit s’exercer. Autrement la préposition de serait remplacée par la préposition in. C’est ainsi qu’en parlant de ce divin Sauveur, l’Église dit dans son Credo : Descendi de cælis, il est descendu du ciel. C’est du ciel qu’il a son origine et il est parti de là pour venir sur la terre.

Comprenez-vous, savantissime M. Dessaulles ? Retenez désormais qu’avant de s’aventurer à faire la leçon au Pape et aux Évêques, il ne faut pas se mettre dans le cas d’être repris, à propos de traduction latine, comme rougirait de l’être un élève de collège qui étudie ses éléments. Vous faites le savant, mais on sait ce que vaut votre science.

Vous citez cet autre texte de nos saints Évangiles : « Les rois des nations les gouvernent ; il n’en sera pas ainsi parmi vous, reges gentium dominantur eorum… vos autem non sic. » Que signifient ces paroles ? Que le pouvoir donné par Jésus-Christ à ses apôtres ne doit pas s’exercer de la même manière que les Césars ont exercé le leur, et voilà tout. Les potentats païens ne régnaient que pour eux-mêmes, et ils considéraient les peuples comme un vil troupeau destiné à pourvoir à tous leurs plaisirs. Notre Seigneur, dans ce texte, dit à tous ceux qui sont constitués en autorité, et à ses apôtres en particulier, qu’ils ne doivent user de leur pouvoir qu’en faveur de leurs subordonnés, et voilà pourquoi il ajoute que celui qui veut être le premier doit se faire le serviteur de tous.