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mais il faut admettre. Tout le rôle de la raison, en pareille matière, se borne à bien établir le fait de la révélation. Ce fait, une fois établi, il ne reste plus qu’à courber le front et qu’à dire amen. Est-ce là cependant ce que vous faites ? Pas le moins du monde. Pour vous, malgré certaines affirmations qui vous allaient à merveille quand elles servaient à fortifier une partie de votre thèse, mais dont vous vous gardez bien de tirer les conséquences, il n’y a pas de foi. C’est la raison humaine qui décide de tout, la raison humaine incarnée dans votre individu. La preuve, vous me la donnez page 87 de votre Grande guerre ecclésiastique lorsque vous dites : « D’une personne à une autre, d’une intelligence à une autre, il ne saurait y avoir d’autre rapport possible que la parole, et la discussion. Pour faire accepter une vérité, il ne faut pas seulement affirmer, mais il faut examiner, discuter et convaincre. Et le seul résultat possible de notre entretien, vous m’affirmant une opinion et moi l’examinant, c’est la conclusion : Je suis convaincu où je ne le suis pas. Si je ne le suis pas, comme la loi du Christ est la loi parfaite de la liberté, vous n’avez pas le droit de m’imposer une opinion dont, dans ma conscience, cette lumière intérieure que Dieu m’a donnée, je ne puis voir la rectitude. La violence pourra sans doute me faire taire, mais produira-t-elle l’adhésion de l’Esprit ? Certainement non… L’ultramontanisme veut que ce soit le Pape, conseillé par un entourage qui, depuis des siècles, se montre absolument étranger aux plus simples notions de la philosophie du droit, qui soit l’arbitre suprême des principes et des opinions des hommes. »

Ainsi, d’après vous, M. Dessaulles, Dieu ou celui qui le représente très-certainement ne saurait être cru sur ses seules affirmations. Il faut qu’il discute, qu’il vous convainque par des raisons que vous agréez, et, s’il vous plaît de n’être pas convaincu, vous l’enverrez promener. Peut-on rien imaginer de plus affreux, de plus orgueilleusement bête ? Je ne le pense pas. Il n’y a pas de système plus propre que celui-là à mettre la stupidité en honneur. En effet, plus on est stupide, moins on comprend, et, comme on ne doit admettre que les vérités que l’on comprend,