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DE LA NATURE DES CHOSES

Leur forme, leur concours, leur ordre, leurs rapports
Manifestent la flamme ou la font disparaître.
Mais ils ne sont ni feu, ni rien qui puisse émettre
D’image corporelle accessible à nos sens.

Dire que tout est feu, que, seuls partout présents,
Les éléments ignés sont l’unique substance,
C’est de l’insanité, quoi qu’Héraclite en pense.
Tournant contre les sens leur propre autorité,
Il fausse l’instrument de toute vérité.
C’est par eux que la flamme à ses yeux se révèle ;
700Là-dessus leur science est donc sûre et réelle ;
Ils connaissent la flamme ; et, sur tout autre point,
Tout aussi clair pourtant, on ne les croirait point !
Est-ce assez de démence ? Et quel secours nous reste ?
Qui distingue le vrai du faux, si l’on conteste
Le jugement des sens ? Dès lors, nier le feu,
Ou le conserver seul, cela coûte aussi peu ;
Dire que, hors le feu, tout est sans existence,
Ou qu’il n’existe pas de feu dans la substance,
Ce n’est ni plus ni moins insensé. C’est pourquoi
Ceux-là de l’univers n’ont pas compris la loi
Qui, par un vain abus de la métamorphose,
D’un élément unique ont tiré toute chose ;
Soit qu’ils donnent au feu le pouvoir créateur,
Soit qu’ils trouvent dans l’air le souverain moteur,
Soit qu’ils fassent de l’eau l’universelle mère,
Ou que pour eux le monde émane de la terre.

D’autres, moins exclusifs et non moins hasardeux,