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DE LA NATURE DES CHOSES

Reste entier dans sa chute et suit le mouvement ;
Car il n’est pas de corps tissu plus fortement,
Pas de cohésion, de nœud plus invincible
Que la froide raideur du fer incoercible.
Ne sois donc pas surpris de voir l’anneau, suivant
Les atomes en foule attirés en avant,
Dans le vide lancer sa rondeur tout entière
(Ce qu’il fait) jusqu’au bord de la puissante pierre.
Un aveugle lien l’y fixe et l’y suspend.
L’action se produit partout où se répand
Le vide ; soit d’en haut, soit de flanc, elle entraîne
Le chaînon le plus proche et l’ajoute à la chaîne.
Sans ce concours de chocs extérieurs, le fer
Ne pourrait pas monter contre son poids dans l’air.
De plus, ce qui l’allège et l’accélère encore,
Tandis que l’air d’en haut plus rare, s’évapore,
L’air d’en bas se dilate et s’élève, chassant,
1040Par derrière, l’anneau vers le vide croissant.
Toujours l’air bat les corps que baigne son fluide ;
Mais sa force, doublée au moment où le vide
Ouvre un espace libre au progrès des anneaux,
Pénétrant dans le fer par mille étroits canaux,
Aux fibres du métal fait sentir son empire,
Comme un vent favorable aux voiles du navire.

Les corps, d’ailleurs, sont pleins de pores et de trous :
Baignés par l’air, ils faut qu’ils en renferment tous,
Puisque à tous leurs contours l’air confine et s’applique
L’air qui se cache au fond du tissu métallique
S’agite incessamment dans son rigide étui ;