Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/278

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
210
DE LA NATURE DES CHOSES

Ne vois-tu pas soudain, couvée au sein des herbes,
Une seule étincelle incendier les gerbes ?
Peut être aussi qu’autour du sublime soleil,
640Invisible cortège au grand flambeau vermeil,
Se pressent mille feux incolores, matière
Où s’avivent les traits de l’ardente lumière.

Mais comment du soleil expliquer les retours,
Et que, d’un signe à l’autre oscillant dans son cours,
Sitôt que du solstice il a touché la borne,
Du torride Cancer il passe au Capricorne ?
Pourquoi faut-il enfin, quand le champ est pareil,
À la lune un seul mois, une année au soleil ?

La cause en est complexe et la raison hésite.
Posons d’abord la loi du sage Démocrite :
Plus les astres, dit-il, sont rapprochés du sol,
Moins le rapide éther en peut hâter le vol ;
Les flots inférieurs du tourbillon céleste
Amortissent leur vol ; et notre soleil reste
En route avec les feux des basses régions ;
Car il nage bien loin des constellations.
Moins élevée encore et du sol plus voisine,
La lune lentement sous le soleil chemine,
Loin de pouvoir lutter avec les astres d’or.
660Un flot plus alangui retardant son essor,
Les signes des saisons doivent d’autant plus vite
Poursuivre, contourner et franchir son orbite ;
Et ceux qu’elle paraît visiter chaque mois,
Ce sont eux qui par an l’atteignent douze fois.