Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/274

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
206
DE LA NATURE DES CHOSES

Et coula tout entière à fond, comme une lie.
Au-dessus de la mer sur le sol établie,
Se développa l’air, puis l’éther constellé ;
Le corps le plus subtil fut par l’autre exhalé.
Le plus léger de tous comme le plus fluide,
Sur l’océan du ciel l’éther toujours limpide
Coule sans se mêler aux flots inférieurs
Qu’il abandonne aux vents, aux foudres, aux fureurs
Des tourbillons. Il marche et, carrière sereine,
Règle l’essor constant des astres qu’il entraîne.
Rien ne peint mieux ce vol mesuré de l’éther
Que les retours certains qui maintiennent la mer
Dans l’uniformité d’une allure immuable.

Quelle cause préside au cours invariable
Des étoiles ? Mes chants vont la déterminer.
540D’abord, l’orbe du ciel peut lui-même tourner ;
Il suffit que, pressant, environnant ses voûtes,
Par deux courants égaux l’air lui trace deux routes,
L’une supérieure et qui tende aux sommets
Où les feux scintillants se meuvent à jamais,
Et l’autre, en sens contraire ouverte sous l’espace ;
Ainsi tourne la roue au gré de l’eau qui passe,
Faisant monter sans peine et descendre les seaux.
Mais le ciel peut aussi demeurer en repos,
Immobile étendue où marchent les étoiles ;
Soit que des flots d’éther enfermés dans ses voiles
Courent, cherchant leur voie et, dans l’immensité,
Impriment à ces feux un vol précipité ;
Soit que l’air par endroits du dehors s’insinue,