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LIVRE QUATRIÈME

1280S’il descend de la femme ou s’il naît de l’amant.

Ce ne sont pas des dieux aux naissances contraires
Qui privent à jamais du nom charmant de pères
Certains époux voués aux stériles hymens.
C’est en vain que Terreur des crédules humains
Enrichit les autels et de sang les inonde
Et, pour en obtenir la liqueur qui féconde,
Fatigue les destins et la divinité.
Seul l’excès d’épaisseur ou de fluidité
À la conception oppose un double obstacle.
La semence trop claire échappe au réceptacle
Sans pouvoir s’y fixer et se prendre en un corps.
Trop grasse et trop concrète, elle s’arrête aux bords,
Ou bien son jet trop lent, trop dense, ne se mêle
Qu’à grand-peine à l’afflux de la liqueur femelle.

Quelle diversité de couples et d’effets !
Pour tels tempéraments tels hommes sont mieux faits ;
De tels amants aussi telle ou telle maîtresse
Reçoit plus aisément le faix de la grossesse.
Après plusieurs hymens stériles, nous voyons
1300Des veuves enrichir d’heureuses unions
Et rencontrer l’époux qui peut les rendre mères.
Bien des hommes ainsi ne sont devenus pères
Et n’ont d’une famille embelli leurs vieux jours
Qu’après avoir trouvé dans de jeunes amours
Une épouse assortie à leur propre nature.
Seul, en effet, l’accord des organes assure
L’intime fusion des germes, accouplant