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DE LA NATURE DES CHOSES

Roulent selon leur pente en flots pulvérisés.
Tous ces groupes enfin qui, tout à coup brisés,
S’échappent en tous sens, vapeur, fumée ou flamme,
Bien que tout ne soit pas rond et lisse en leur trame,
De nœuds trop forts non plus ne sont pas attachés :
Ce qui pique nos sens traverse les rochers.
Leurs germes ne sont pas adhérents et tenaces,
Puisqu’un souffle de vent les disperse. Leurs faces
Présentent, non des crocs, mais des aiguillons droits.

Le fluide et l’amer se combinent parfois,
Comme dans l’eau marine. Eh bien ! le fait s’explique :
Ce qui blesse est aigu, ce qui glisse est sphérique.
Les deux types mêlés ne s’enchevêtrent pas ;
480Nul besoin de crochets ; ils vont du même pas ;
Il en résulte un corps qui déchire et qui coule,
Acide puisqu’il mord, globuleux puisqu’il roule.
Fais mieux. Prends sur le fait ces crocs et ces rondeurs
Que Neptune amalgame en ses acres sueurs.
En les désagrégeant, distingue leur nature.
La terre qui boit l’onde en la filtrant l’épure
Et dans ses réservoirs la distille sans fiel ;
L’amère aspérité des principes du sel
Dans les pores du sol les arrête au passage.

De ces enseignements découle et se dégage,
Corollaire certain, une autre vérité :
Des types différents le nombre est limité.
Sans quoi nous pourrions voir la forme de tel germe
Exiger le concours d’accessions sans terme.