Page:Lucrèce, Virgile, Valérius Flaccus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/398

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Massicus le premier fend les flots de sa proue au tigre d’airain. Sous lui s’avancent, mille guerriers qui ont quitté les murs de Clusium et de Cosa : leurs armes sont des flèches, de légers carquois, l’arc homicide. (10, 170) Sur la même ligne vogue le farouche Abas avec sa troupe brillante : sur sa poupe resplendit un Apollon d’or. Pour lui Populonie a tiré de son sein six cents jeunes soldats aguerris ; l’île d’Ilva lui en avait donné trois cents autres ; Ilva, sol généreux et inépuisable en métaux. Après eux, et le troisième, venait Asylas, l’interprète des dieux ; Asylas, pour qui n’ont de secrets ni les fibres des taureaux, ni les astres du ciel, ni la langue des oiseaux, ni les présages de la foudre : il entraîne avec lui mille soldats, impénétrable bataillon, hérissé de lances : (10, 179) fille de l’Alphée, et Toscane par le sol, Pise a voulu qu’il les commandât. Suivait le bel Astur, fier de son coursier docile et de son armure aux diverses couleurs. Il mène avec lui trois cents guerriers, qu’un même esprit entraîne sur ses pas : ils viennent de Cérète, de l’ancienne Pyrge, de Gravisque à l’air impur, et des campagnes arrosées par le Minion. Je ne te passerai pas sous silence, brave Cinyras, chef des Liguriens, ni toi et ta petite troupe, ô Cupavon : les plumes de cygne qui s’élèvent sur ton casque annoncent que l’amour a été le crime de ta maison, et représentent la métamorphose de ton père. Car on raconte que Cycnus, touché du malheur de son cher Phaéthon, (10, 190) pleurait son ami sous le feuillage ombreux des peupliers ses sœurs, et charmait par ses chants ses tristes amours : il vieillit en chantant, vit son corps se couvrir d’un doux duvet, quitta la terre, et toujours, chantant, s’envola vers les cieux. Son fils, qui mène aussi avec lui trois cents de ses compagnons, pousse à force de rames un immense navire : c’est le Centaure ; le monstre du haut de la proue, où superbe il se dresse, pèse sur les eaux, et menace l’abîme d’un énorme rocher ; du reste de son corps allongé en carène il sillonne les mers profondes. Ocnus aussi amène des soldats de la contrée de ses pères ; Ocnus, fils du Tibre et de la prêtresse Manto : (10, 200) c’est lui, Mantoue, qui a bâti tes murs, et qui t’a donné le nom de sa mère : Mantoue fut riche en aïeux célèbres ; tous n’ont pas la même origine. Trois nations, divisées en quatre tribus différentes, reconnaissent Mantoue pour leur capitale : mais sa force lui vient du sang étrusque. Cinq cents autres guerriers qu’arme contre Mézence une haine commune voguent portés par le Mincio ; couronné de verts roseaux par son père Bénacus, le Mincio les conduisait à travers les mers sur sa carène armée. Auleste, leur vénérable chef, monte cette galère ; cent rames se lèvent ensemble pour battre les flots ; la mer retournée se blanchit d’écume. Un vieux Triton porte Auleste et sa troupe ; des sons de sa conque (10, 210) il épouvante les mers : il présente jusqu’aux flancs la figure velue d’un homme qui nage ; le reste de son corps se termine en baleine ; et sous sa poitrine sauvage l’onde blanchit et murmure. Tels étaient les illustres chefs de la