Page:Lucrèce, Virgile, Valérius Flaccus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/361

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

corce enlevée au liège, des boucliers et des glaives d’airain qui resplendissent. Et toi, brave Ufens, toi, renommé, par tes armes tant de fois heureuses, tu quittas pour les combats les montagnes de Nersa : là tu commandes à des nations sauvages, à d’infatigables chasseurs, à l’ÉquicoIe indomptable qui laboure tout armé une terre ingrate, et qui, toujours traînant avec lui une proie nouvelle, n’aime, ne respire que rapine. (7, 750) Le vaillant Umbron, grand prêtre de la nation des Marrubiens, vient aussi, envoyé par le roi Archippe ; il porte sur son casque l’olivier de la paix. Les vipères et les hydres, soufflant la rage et le poison, s’apaisaient, endormies par ses chants et par ses magiques attouchements : il savait aussi guérir leurs morsures. Mais son art fut impuissant contre les coups du fer troyen ; et sa blessure ne put être adoucie ni par ses enchantements, ni par les herbes soporifiques cueillies sur les montagnes des Marses. Malheureux Umbron ! les bois d’Anguitie, la claire fontaine et le lac limpide du Fucinus (7, 760) te pleurèrent.

Comme lui marchait le beau Virbius, digne fils d’Hippolyte et d’Aricie ; sa mère l’envoya dans les champs de la gloire : elle l’avait élevé dans les bois sacrés d’Égérie, le long de cet humide rivage où se voit encore un riche autel élevé à Diane compatissante. Hippolyte, si l’on en croit la renommée, après qu’il eut péri par les artifices de sa marâtre, et satisfait par son sang à la colère d’un père, traîné de çà et de là, et déchlré par ses coursiers, fut rendu à la lumière et rappelé sous la voûte des cieux par la vertu merveilleuse des herbes de Péou, et par la pitié de Diane attendrie. (7, 770) Alors le père tout-puissant des dieux, indigné qu’un mortel, plongé dans les ombres des enfers, se fût élancé de nouveau à la lumière, foudroya le fils d’Apollon lui-même, l’inventeur de cet art impie, et le précipita dans les gouffres du Styx. Mais Diane dans sa bonté cacha Hippolyte au fond de ses bois les plus secrets, et le confia à la nymphe Égérie. Là, seul dans les forêts, inconnu de l’Italie, il devait couler des jours mystérieux sous le nom emprunté de Virbius. Encore aujourd’hui on écarte du temple de Diane et de ses bois sacrés les coursiers à la corne sonnante : c’est que sur ces mêmes rivages les coursiers d’Hippolyte, (7, 780) épouvantés par un monstre marin, emportèrent et le jeune héros et son char fracassé. Son fils ne laissait pas d’exercer dans la plaine des chevaux fougueux, et de lancer son char dans les batailles.

Cependant Turnus, les armes à la main, efface les guerriers par sa beauté majestueuse, et les passe de toute la tête. Le cimier de son casque, orné d’un triple panache, porte la Chimère vomissant, comme l’Etna, des tourbillons de flammes ; plus le sang coulait et plus s’échauffait le combat, plus elle frémissait, plus s’irritaient et sa rage et ses feux. Sur l’orbe poli de son bouclier la belle Io dressait ses cornes (7, 790) d’or, Io déjà couverte de poils, déjà transformée en génisse : longue et lamentable histoire gravée sur l’airain. Argus est là qui garde la vierge, et près d’elle Inachus, son père, épanche les ondes de son urne. Turnus est suivi d’une nuée