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ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. Les magiques paroles peuvent faire descendre Phébé des cieux ; (8, 70) par elles, Circé transforma les compagnons d’Ulysse : le froid serpent, dans les prés, meurt brisé par la voix enchanteresse. Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. D’abord j’entoure ton image de trois bandeaux de diverses couleurs, et je la promène trois fois autour de cet autel : le nombre impair plaît aux dieux. Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. (8, 80) Comme cette argile durcit, comme cette cire se liquéfie au même brasier, que Daphnis ressente les mêmes effets de mon amour. Jette cette pâte ; brûle avec le bitume ces fragiles lauriers. Le cruel Daphnis me brûle, qu’il brûle en ce laurier. Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. La génisse, lasse de chercher dans les bois et de colline en colline un jeune taureau, tombe sur l’herbe verdoyante au bord d’un ruisseau, et, perdue d’amour, ne pense pas que la nuit la rappelle à l’étable : que Daphnis soit possédé pour moi de la même ardeur incurable et délaissée. (8, 90) Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. Voici les dépouilles qu’autrefois le perfide m’a laissées, chers gages de son amour ; terre, je les dépose dans ton sein sous le seuil même ; ils me sont garants du retour de Daphnis. Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphuis. Ces herbes, ces poisons cueillis dans les campagnes du Pont, c’est Méris lui-même qui me les a donnés : ils naissent innombrables dans le Pont. Par leur vertu merveilleuse, j’ai vu souvent Méris devenir loup et s’enfoncer dans les bois ; je l’ai vu faire sortir les mânes de leurs tombeaux ; je l’ai vu transplanter des moissons d’un champ dans un autre. (8, 100) Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. Amaryllis, porte ces cendres hors de la maison ; jette-les par-dessus ta tête dans le ruisseau, et ne regarde pas derrière toi. C’est avec toutes ces armes que j’attaquerai Daphnis : mais il se rit, l’infidèle, et du charme et des dieux ! Ramène de la ville en ces lieux, charme puissant, ramène-moi Daphnis. Vois, tandis que je tarde à l’emporter, cette cendre a d’elle-même enveloppé l’autel de flammes tremblottantes : bon présage ! Mais qu’entends-je ? Hylax aboie sur le seuil. Le croirai-je ? Ou les amants se forgent-ils des songes à plaisir ? Cessez, charmes puissants, Daphnis revient de la ville ; cessez, voici Daphnis.






ÉCLOGUE IX
MÉRIS.

LYCIDAS, MERIS.

LYCIDAS.

(9, 1) Où vas-tu, Méris ? suis-tu le chemin de la ville ?