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raient stériles rencontrent à peine des natures analogues, que des enfants croissent, doux appui autour de leur vieillesse.

Tant il importe que les deux germes opèrent un mélange créateur, que les sucs fluides se marient aux sucs épais, et les épais aux fluides ! Ici, le choix des aliments qui nous soutiennent est fort grave ; car les uns épaississent dans les membres la sève qui est amaigrie, délayée par les autres. Il faut même regarder comment tu organises la douce volupté. (4, 1260) On croit généralement que les animaux, les quadrupèdes nous offrent le modèle des attitudes les plus fécondes : car une fois les poitrines à plat et le rein exhaussé, les canaux pompent aisément la sève. Vénus ne demande point aux femmes un mouvement élastique. Non ; elles empêchent et contrarient la conception, si leurs joyeux bondissements répondent aux coups des hommes, si, de toute la force de leur poitrine assouplie par l’amour, elles aspirent le flot qui doit les rendre fécondes. Elles ôtent le soc égaré du sillon, elles écartent du but le jet créateur. (4, 1270) Aussi nos courtisanes exploitent-elles ces agitations, tant pour éviter le doux fardeau et ne pas tomber enceintes, que pour assaisonner leur vénus infâme. Mais nos épouses ont-elles besoin de ces raffinements ?

Il arrive parfois que, sans intervention divine ni flèche de Vénus, une femme sans beauté, inspire de longs amours. Sa conduite, des mœurs faciles, et un soin exquis de sa personne, nous habituent facilement à passer nos jours avec elle.

En général, l’habitude est l’intermédiaire de l’amour : (4, 1280) car, si faibles que soient des coups éternellement répétés, ils domptent enfin et ruinent les êtres. Ne vois-tu pas que les moindres gouttes, tombées des nues, creusent le roc où leur humidité séjourne ?





LIVRE V.


(5, 1) Quel être peut avoir au cœur des inspirations si hautes que ses accents répondent à la magnificence du sujet, à ses grandes découvertes ? ou des paroles assez fortes pour exalter dignement le sage qui nous laissa mille biens inestimables, fruits de ses recherches, conquêtes de son intelligence ? Aucun mortel, je crois. Car si on veut un langage qui atteigne la majesté bien connue de ses œuvres, ce fut un dieu, oui, un dieu, illustre Memmius, celui qui le premier trouva ce plan de conduite, (5, 10) maintenant appelé sagesse ; celui dont l’industrieuse pensée tira la vie de tant d’orages et de si épaisses ténèbres, pour l’établir dans un port si tranquille, au sein d’une lumière si éclatante !

Compare ce bienfait à quelques vieilles inventions divines. Cérès apporta, dit-on, aux mortels les fruits de la terre ; Bacchus fit jaillir le nectar des vignes : mais leurs dons étaient-ils nécessaires au maintien de la vie ? La renommée cite des nations qui vivent sans les posséder encore ; tandis que, sans un cœur pur, il leur