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LE MAL DES ARDENTS

titres. Il se mit à rire. Comme si on pouvait songer à cette folie sans rire ! Mais son rire se figea : Abraham possédait une partie de ces titres. Ne les lui céderait-il pas s’il lui proposait une monnaie d’échange avant qu’il fût averti du péril que courrait son père par cet échange ? Oui, mais quelle monnaie d’échange ? Rien qui l’intéressât, ce Pascal juif, ma parole, qui devenait de plus en plus mystique. À moins que… Il rougit, pâlit, fit un geste comme avec effort, regarda autour de lui…

« De toute manière, puisque je ne trouve rien, il faudrait commencer par quelque chose qui me paraît important, sinon nécessaire, me procurer de l’argent. » Cela, il connaissait bien le moyen : se faire ouvrir un crédit de banque sur son actif des asphaltières. Mais quelle banque ? Il était un inconnu partout. Son affaire était ignorée. Une banque l’éconduirait ; si elle ne l’éconduisait pas, elle ferait examiner l’affaire, voudrait tout connaître, se trouverait fatalement en contact avec Blinkine et Mulot, refuserait ; si elle ne refusait pas, elle procéderait à un nouvel examen, technique cette fois : il y aurait des envois d’ingénieurs, tracas, soucis, pots-de-vin, temps perdu, peut-être une nouvelle concurrence à craindre ; si enfin elle marchait, ce serait au compte-gouttes, par une ouverture de crédit dérisoire. À ce moment il pensa à Orsat. Oui, c’était là la solution. Plus il y songeait, plus il en était persuadé. Orsat pouvait lui faire donner, par sa caution personnelle auprès de sa banque, un crédit qu’il n’obtiendrait pas autrement.