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LE FINANCIER RABEVEL

de passer sur ces terrains désormais à eux et qui cernent les miens ; ils vont me mettre dans l’impossibilité d’exploiter si je ne les empêche d’abord de lever l’option, c’est-à-dire de payer les trois cent mille francs. Que faire, Bon Dieu, que faire ?… » Il réfléchissait en se rendant à son bureau, il ne sentait pas la fatigue. Il s’enferma, se plongea dans un fauteuil de cuir profond, la main sur les yeux : à plusieurs reprises il vint à sa table, calcula, crayonna ; enfin, il soupira : « Rien à faire. Et j’ai la tête lourde comme un melon. » Il sortit pour prendre l’air. « Évidemment, se disait-il, ces deux saligauds veulent ma peau et ils y mettent le prix ; il faut reconnaître qu’ils ont bien joué. Comment les empêcher ? » Il avait gagné les quais, suivait la berge de la Seine, laissant son regard errer distraitement sur les eaux. La sirène d’un remorqueur le fit soudain tressaillir. Son visage s’illumina et il s’arrêta sur le coup. « Un seul moyen. Un seul. Leur créer dans leurs affaires de bateaux un empoisonnement qui puisse les détourner des asphaltières ». Il se rembrunit « pas facile… pas facile… » Il se rémémora la répartition des actions de la société Bordes. Oui, il pourrait à la rigueur disposer des voix de la veuve Boynet. Mais, pour bien faire, il faudrait que Bordes et Maselier acceptassent de marcher avec lui. Mais ceux-là étaient trop malins, ayant à jouer leur rôle d’arbitre, pour ne pas se faire payer cher leurs services et les vendre au plus offrant. Rien à faire de ce côté. À moins de démunir Blinkine et Mulot de leurs