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LE FINANCIER RABEVEL

parce que votre vie va avoir un but ; enfin, parce que vous aurez une compagne à aimer. Après cela, si vous comptez sur une récompense de votre Bon Dieu, vous êtes vraiment exigeante.

Mais elle :

— Voyez-vous comme il raisonne ce gredin ! Mais on le convertira, on le convertira.

Quand le médecin eut achevé d’écrire son ordonnance et de faire ses recommandations, elle le remercia, lui donna son chapeau, le poussa vers la porte ; elle supporta avec un visible ennui les excuses embarrassées de Bernard pour l’immense dérangement qu’il allait lui causer. Elle lui fit préparer un lit, décida qu’il mangerait à sa table et devant son insistance le laissa fixer un prix de pension qu’elle déclara avoir l’intention de donner aux Petites Sœurs des Pauvres ; puis, enfin débarrassée de lui, elle put consacrer une âme vigilante et un corps infatigable aux soins que réclamait l’état d’Angèle.

Le Docteur Porge revint le soir ; le mal avait empiré : il ordonna des ventouses scarifiées et tout une médication minutieuse et compliquée : « Vous n’aurez pas une minute à dormir, Madame Boynet », dit-il en conclusion. Bernard inutile, encombrant, conscient de ce rôle de paquet toujours sur le passage, demandait vainement qu’on lui trouvât une occupation :

— Les hommes ne savent rien faire, répondit vertement la veuve, vous pouvez aller vous coucher.