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LE MAL DES ARDENTS

porte ; machinalement il lut un nom à demi effacé par le temps : Boynet, notaire. Et aussitôt il imagina Angèle alitée, la veuve et lui à son chevet ; il respira plus fort, feignit l’essoufflement et, paraissant s’aviser du banc de pierre accotté à la maison du notaire au moment même où il arrivait à son niveau, il y porta Angèle et l’y assit. Et là, de nouveau, il lui suffit de regarder le beau visage meurtri pour oublier tout ce qui n’était pas elle et même l’endroit où ils se trouvaient.

Il restait auprès d’elle, ne sachant que faire, tout affolé (pour la première fois lui semblait-il) et persécuté tout à coup par la terrible peur de voir expirer sous ses yeux l’être pour qui, en cette minute, il eût donné sa vie. Mais on avait entendu, dans la maison, le bruit de leurs voix, une figure curieuse parut derrière un rideau soulevé, la fenêtre s’ouvrit.

— Péchère, qu’elle a l’air malade votre dame, monsieur, dit une voix. Il faut la rentrer ici, et vite ! Attendez que je prévienne Madame et je viens vous aider. L’instant d’après, aidé par la servante, Bernard avait installé la jeune femme sur un fauteuil, auprès du feu, dans une grande cuisine reluisante de cuivres. La maîtresse de maison accourue avait tout de suite tiré un trousseau de clefs et se mettait en quête d’un cordial et d’herbes aromatiques.

— Allez donc chercher le docteur Porge, Maria, » dit-elle, tout en fouillant ses placards. Bernard les bras ballants,