Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/76

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
76
LE MAL DES ARDENTS

de dégoût. Elle ne sentit plus de son vertige que son entraînement horriblement sexuel, se mit sur son séant, blanche et réellement secouée d’une nausée. Elle repoussa Bernard du bras, la figure bouleversée de crainte et du déchirement intérieur. L’image de la Tante Rose, humble et vertueuse, l’image de Blinkine ardemment repenti et qui peut-être priait pour elle à cette heure dans une cellule, l’image du petit Olivier soudain prévenu de son indignité et ruisselant de larmes, lui apparurent, insupportables, la rejetant avec mépris dans une irrémissible honte. Ce fut une crise de désespoir étouffé, affres silencieuses qui craignaient l’éveil de la maisonnée muette, de larmes ravalées, de hoquets qui la secouaient à la briser ; la mise en œuvre, pour la destruction et le détraquement, de tous les ressorts prodigieux d’une incomparable machine vivante.

Bernard essayait en vain de la calmer mais il semblait que ses paroles ne fissent que l’exciter davantage. Presque à voix haute, sauvagement, elle faisait : « Mourir, ah ! mourir ! » Il lui disait tendrement : « Angèle, mon Angèle ». Mais elle répétait encore : « Mourir ! Je veux mourir… » Et le repoussant avec violence, elle finit par ajouter : « Tu es la cause de tout, toi, crapule ! » puis par le secouer, le mordre à pleines dents. Il se laissait faire, serrant les mâchoires, résistant à l’envie de la rouer de coups, espérant qu’elle allait enfin se taire. Et, en effet, elle retomba haletante, les yeux clos. Elle demanda : « Quelle heure