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LA FIN DE RABEVEL

pour respirer le fumet d’un repas qui sent bougrement bon, si nous ne comptions absolument que vous serez ce soir des nôtres pour faire honneur à ce repas. Nous avons en effet l’intention de fêter dignement le succès que nous venons de remporter aujourd’hui en démasquant l’escroc dont nous, et vous avec nous, avons été victimes et qui a failli tuer dans l’œuf une affaire véritablement destinée à la prospérité la plus grande. Mais je vous tiens plutôt pour des associés que pour des créanciers et je vais me faire un plaisir de vous raconter la petite comédie à laquelle s’était livré notre fournisseur. » Il leur raconta, en effet, avec son brio habituel, la scène de l’après-midi et conquit son auditoire déjà prévenu en sa faveur par l’admiration communicative de l’huissier. Il entra ensuite dans l’exposé des possibilités de l’affaire et proposa un système de paiements échelonnés et sans intérêts. Son astuce oratoire toujours en éveil, apte à saisir les interruptions ou les velléités d’interruptions pour les tourner à l’avantage de l’interrupteur flatté et s’en faire un partisan, eut tôt obtenu l’assentiment général : « Monsieur Bétournel, disait-il par exemple, me pose une objection qui est en effet fort grave et que je le remercie de signaler, car nous allons la résoudre de manière à ne pas laisser de doute dans nos esprits… Monsieur Pigasse, dont on voit bien qu’il doit avoir une grande habitude des affaires, me fait observer avec juste raison… Monsieur Caraman est plus perspicace que moi, j’avais en effet négligé le côté de la question qu’il nous