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LE MAL DES ARDENTS

Marc l’accompagna jusqu’à la porte. Personne ne lui fit remarquer qu’elle oubliait son portrait.

***

À quelque temps de là, en plein hiver, un vieil homme venait prendre possession de l’école primaire de Pampelonne. Il se nommait Clavenon et était très recommandé à son Inspecteur. Il s’installa dans une maison isolée où il vécut seul, sans relation aucune, en saint laïque ; il enseignait une morale évangélique et prêchait d’exemple. Il ne fréquentait pas l’église, avait donné à comprendre qu’il ne croyait à rien, offrait la figure du désespoir qui se contient. Quand le printemps arriva, l’horizon rouergat s’éclaircit ; on put voir des terrasses de Pampelonne le clocher de la Commanderie et le petit cimetière qui l’entoure. Le maître d’école passait des heures à le contempler. Un matin d’avril pendant les vacances de Pâques, il se heurta à des touristes au détour d’une ruelle. C’était une femme de figure mélancolique et un homme encore jeune sur qui elle s’appuyait tendrement. Elle regarda le maître d’école et dit à mi-voix à son compagnon :

— Ne trouvez-vous pas, mon bon Gontil, que ce vieux a quelque chose de notre pauvre Bernard ?

— Peut-être, répondit son interlocuteur, mais en beaucoup plus âgé ; il pourrait être son père.

Le maître d’école redescendit à sa maison ; il avait éprouvé soudain une telle secousse, un tel retour bouillonnant de