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LE MAL DES ARDENTS

Le péristyle d’un goût si pur, la mosaïque éteinte, l’harmonie mesurée des massifs, le jet d’eau nostalgique font de la cour intérieure un ensemble achevé de l’art français. Olivier ne connaissait pas d’architecture qui lui plût davantage. Un sens très moderne s’y révèle, mais sans l’inquiétude des névroses. La grandeur ne s’y altère point de fausse pompe. La majesté n’y est pas glaciale. Tout y est précis, on en a la certitude, et pourtant on n’y sent pas la mathématique. Et, privilège inestimable qui en décèle la valeur, cette œuvre récente invite au rêve comme les très vieilles architectures chargées d’histoire, comme la nature elle-même. C’est pourquoi ce lieu avait été le but favori de ses promenades avec Isabelle. Ils aimaient y passer leurs loisirs, et, ce dernier après-midi, il y pénétra avec un peu d’émotion. Depuis combien d’années n’avait-il pas foulé ce seuil ? Il reconnut pourtant les choses ; elles n’avaient pas changé ; on y avait ajouté sans doute, mais le monument demeure et les premiers chefs-d’œuvre qu’il aimait l’accueillirent encore avec ce doux sourire qu’on prête à des amours. Voici les grandes toile de Carrière, voici… mais il passa, vite, il alla savourer le soleil sur le petit banc vert qu’il connaissait, au pied de Manon.

Manon était toujours là sous la voûte contemplant le jet d’eau. Et il reconnut le gardien qui l’examinait avec attention.

— Eh bien ! père Budel, comment va la santé ?

— Ah ! Monsieur, je me disais aussi ; c’est un ami