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ŒUVRES COMPLÈTES


DE LUCIEN.





XXXIX

LES PORTRAITS[1].




LYCINUS ET POLYSTRATE.

[1] 1. Lycinus. Oui, mon cher Polystrate, ce qu’on éprouvait jadis à la vue de la Gorgone, je viens de l’éprouver tout à l’heure en voyant une belle femme. Peu s’en faut que je n’aie été pétrifié, comme dans la Fable ; j’en suis encore tout immobile d’admiration.

Polystrate. Par Hercule ! il fallait que ce fût une beauté divine et d’un aspect bien saisissant, puisque, étant femme, elle a pu frapper à ce point Lycinus. Qu’un jeune garçon eût produit cette impression sur toi, c’est assez ton habitude. On parviendrait plutôt à déplacer le mont Sipyle[2] qu’à te distraire de la compagnie des jeunes gens aimables ; on te voit toujours auprès d’eux, la bouche ouverte, les yeux en larmes parfois, comme la

  1. Ce dialogue est, suivant Dusoul, l’éloge d’une certaine Panthéa de Smyrne, maîtresse de Lucius Vérus, et, selon Wieland, le portrait physique et moral de Lucilla, femme de Marc Aurèle. Quelques éditeurs croient que cet opuscule n’est pas de Lucien ; les meilleurs critiques ne doutent point de son authenticité.
  2. Montagne de Lydie, sur le sommet de laquelle on disait qu’était Niobé, changée en rocher.