nom de Jupiter ! du moins pour le moment ; épargne aussi ta barbe, ne la souille pus davantage, ne la couvre plus d’ignominie ; ou, si tu ne peux t’en empêcher, que ce soit durant la nuit, dans les ténèbres, car pour le jour, fi donc ! ce serait de la sauvagerie, de la bestialité !
32. Tu voix combien il eût mieux valu pour toi de ne pas troubler les eaux de Camarine[1] et de ne pas te moquer d’Ἀποφράς, qui va désormais apophraser ta vie entière. Te manque-t-il un coup de pinceau ? Autant qu’il est en moi, il ne te manquera pas longtemps. Tu ne sais pas encore quel tombereau tu as attiré sur toi, fine poussière, vieux renard, toi qui devrais trembler quand un homme à poil, ou, comme disaient nos aïeux, un gaillard aux fesses noires, te regarde seulement d’un air sévère. Tu ris peut-être de ces mots fine poussière et vieux renard ; tu crois entendre des énigmes et des logogriphes, car les noms mêmes de tes vices te sont inconnus. Voici donc une belle occasion pour toi de calomnier ces expressions, si Ἀποφράς ne t’avait payé au triple et au quadruple. Au surplus, ne t’en prends qu’à toi ; car, comme l’a dit le bel Euripide[2],
Une bouche sans frein, sans règle et sans pudeur,
Nous entraîne à la fin au plus cruel malheur.
LXI
SUR UN APPARTEMENT[3]
1. Ainsi Alexandre eut envie de se baigner dans le Cydnus[4], en en voyant les eaux belles, transparentes, profondes sans
- ↑ « Lac situé en Sicile, près d’une ville du même nom. Les habitants de cette ville, voulant donner un écoulement à ses eaux, consultèrent l’oracle d’Apollon, qui leur répondit : Ne troublez pas les eaux de Camarine. Ils désobéirent à l’oracle, travaillèrent à faire écouler les eaux, dont la corruption leur causa de violentes maladies. De là est venu le proverbe : Μὴ κίνει Καμαρίναν, » Belin de Ballu.
- ↑ Bacchantes, v. 385.
- ↑ Wieland et Schmieder attribuent ce morceau à la jeunesse de Lucien.
- ↑ Voy. notre Essai sur la légende d’Alexandre le Grand, p. 111 et suivantes.