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mille. — Et quelles sont leurs armes ? — Rien que des arêtes de poisson. — Cela étant, lui dis-je, nous ne risquons rien à les attaquer, puisqu’ils n’ont pas d’armes et que nous en avons. Si nous sommes vainqueurs, nous vivrons désormais sans inquiétude ». Cet avis prévaut, et nous regagnons notre vaisseau pour faire nos préparatifs. Le refus du tribut devait être le prétexte de la guerre. C’était justement l’époque de l’échéance ; des ambassadeurs étaient venus pour le recevoir. Le vieillard leur répond avec hauteur et les chasse. Aussitôt les Psettopodes et les Pagourades, indignés contre Scintharus, c’était le nom de notre hôte, marchent contre lui avec un grand tumulte.

37. Nous avions prévu leur attaque : nous les attendons de pied ferme, tout en armes, après avoir envoyé une vedette de vingt-cinq hommes, avec l’ordre de ne sortir d’embuscade que quand ils auraient vu les ennemis passés. Ils exécutent cette manœuvre, tombent sur les derrières de nos agresseurs, et les taillent en pièces. Pour nous, qui étions aussi au nombre de vingt-cinq, y compris Scintharus et son fils, qui avaient également pris les armes, nous les attaquons de front, et, engageant la mêlée avec courage et vigueur, nous livrons un combat douteux. Enfin, nous les mettons en fuite, et nous les poursuivons vivement jusqu’à leurs cavernes. Ils laissent cent soixante-dix des leurs sur la place ; nous n’avons qu’un seul homme tué, le pilote, qui a le dos percé d’une arête de rouget.

38. Nous restons ce jour et la nuit suivante sur le champ de bataille, et nous y dressons un trophée fait de l’épine dorsale d’un dauphin. Le lendemain, les autres peuples, ayant appris la défaite de leurs alliés, se présentent à nous : les Tarichanes, commandés par Pélamus, à l’aile droite ; à la gauche, les Thynnocéphales ; au centre, les Carcinochires. Les Tritonomendètes avaient gardé la neutralité et ne s’étaient rangés d’aucun parti. La rencontre se fit près du temple de Neptune. Nous nous élançons en poussant de grands cris, qui retentissent dans la baleine comme dans une caverne profonde. Nous mettons en fuite nos adversaires désarmés, nous les poursuivons à travers la forêt, et nous restons maîtres du reste de la contrée.

39. Quelque temps après, ils nous envoient des hérauts, enlèvent leurs morts et font des propositions d’amitié. Nous refusons toute espèce de trêve, et, pénétrant le lendemain sur leur territoire, nous les taillons tous en pièces, à l’exception des Tritonomendètes. Mais ceux-ci, ayant vu de quelle manière nous