gile barque parmi les tourbillons d’une eau bossuée d’écueils. Avec quelle habileté nonchalante il manœuvre ! Les difficultés d’une navigation pareille ne l’empêchent pas un instant de parler avec le Roumi merveilleux qui connaît l’arabe mieux que lui. J’ai retenu sa conclusion. Elle corrobore ce que j’ai compris de l’Égypte indigène, si splendidement inconsciente de son passé.
— Les gens de l’Occident sont drôles. Ils font un grand voyage sur la mer pour venir chez nous, et c’est toujours pour voir trois vieilles pierres qui n’ont rien d’intéressant.
C’est en descendant plus bas encore que, du côté d’Assoüan, nous avons rencontré les Bicharis, tribus impressionnantes d’être nues avec anneaux dans le nez, arcs et flèches, et, dans leurs visages presque noirs, des petits yeux d’or qui font peur. Regardés de travers par toutes les religions, on pense qu’ils sont les derniers adorateurs des dieux du Nil.
Ce qui ne les empêche pas d’accourir dès qu’ils voient un étranger, et de prendre des poses photographiques pour kodaks européens.
Assoûan.
On dit que la peste y est endémique. Nous nous y reposâmes longtemps d’une chaleur à s’évanouir, assis sur le bout de cet obélisque géant qu’on y trouve couché sur le sol, non pas déraciné par le temps mais non terminé, mal dégrossi, sans inscriptions, et dans l’attente nostalgique de son achèvement.
Il est étrange de penser que le barrage du Nil, gigantesque ouvrage anglais entrepris pour augmenter en-