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L’été fini, nous étions sur le chemin du retour. Smyrne fut notre dernière ville turque, trop rapidement vue pour qu’il m’en reste de quoi meubler mes souvenirs. Par Athènes et Naples, puis par Rome, Florence et d’autres beautés italiennes, le jour vint enfin de regagner Paris.

De ce voyage en Turquie, que de richesses rapportées ! Surtout d’imprévisibles charmes, d’inespérées émotions qui ne devaient jamais s’effacer, puisque je les ressens encore aujourd’hui.

L’Orient doré dont rêvent les Occidentaux qui n’ont pas voyagé, je l’aurai connu sous les aspects et dans les enseignements d’un soufi pareil aux plus adorables fables, aux plus séduisants passés de cette terre asiatique d’où sont sorties tant de religions, où se sont déroulés tant de fastes.

Pour concrétiser mes souvenirs je possède, comble de fragilité, butin découvert à Brousse, une feuille squelettique de tilleul appliquée sur un fond de satin mauve et mise sous verre, et sur laquelle s’inscrit, en lettres arabes dessinées avec de l’or, le mot le plus mystérieux du monde : Allah ouahdou.

Cette parole : Dieu est seul, gouffre de tristesse quand on la creuse, a la concision de celles de Salaheddîne, mais non leur sérénité. Cependant elle m’est aussi proche que son enseignement.