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Constantinople

L’année 1909, en mai, je fus heureuse d’être choisie par Le Journal pour aller à Constantinople. (Aucune mention d’Istambul à cette époque.)

C’était au lendemain même de la révolution qui déposa le sultan Abdul-Hamid. Le souffle de liberté qui venait d’aérer la Turquie était-il parvenu jusqu’au seuil calfeutré des harems ? Telle se présentait la question que je me proposais d’étudier.

Le hasard fait bien les choses, quelquefois. Cette incursion chez les femmes établissait à point le contraste le plus formel avec mon voyage du Sud-Oranais, où, pas un instant, je n’avais cessé d’être en compagnie exclusivement masculine.

Mon mari m’accompagnait. L’Orient sans lui n’aurait plus été qu’une façade pour touristes. Du reste il avait de son côté des projets, futures écritures.

La main dans la main, mais chacun sa mission.


Après l’Orient-Express qui nous dépose en route d’abord à Vienne puis à Buda-Pest où notre séjour se prolonge quelque peu, passant par Bucarest nous nous embarquons enfin à Constanza sur la Mer Noire. Un beau bateau roumain nous mènera jusqu’au Bosphore, jusqu’à Constantinople.

Mer Noire… Bosphore… Constantinople… À l’âge de la géographie et du nez sur l’atlas, ces noms-là me fascinaient. Étais-je tout à fait sûre aujourd’hui que, dans un


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