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Un volcan souterrain, indigné d'être esclave,
Vous a vomis jadis avec un flot de lave ?

Les sauvages buissons de mûres diaprés,
Calmes, avec orgueil montraient leurs fruits pourprés.
A peine si parfois, parmi les branches hautes,
Un léger mouvement me révélait des hôtes ;
Et pourtant, si ma main, écartant leur fouillis,
Eût fait entrer le jour dans ces vivants taillis,
J’aurais vu s’y tapir dans les ombres fumeuses
L’épouvantable essaim des bêtes venimeuses !

Or je disais devant ce spectacle divin :
« Poëte, voile-toi pour le vulgaire vain !
« Qu’il ne puisse à ta muse enlever sa ceinture,
« Et souris-leur, pareil à la grande Nature !
« Sous ta sérénité cache aussi ton secret ! »
Réponds, ai-je tenu ma parole, ô forêt ?
Et n’ai-je pas rendu mon âme et mon visage
Silencieux et doux comme un beau paysage ?

THÉODORE DE BANVILLE.