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font saillir des muscles semblables à des nervures de chêne ; ses cheveux mêlés ressemblent à des broussailles ; son teint a des nuances verdâtres, et ses joues sont veinées de fibrilles rouges comme les feuilles aux approches de l’automne ; ses pieds mordent le sol comme des racines, et il semble que ses doigts se divisent en branches ; son chapeau se découpe en couronne de feuillage, et le côté végétal apparaît bien vite à l’œil attentif.

C’est sous la protection de ce dieu sans ouvrage que prospère cette belle forêt de Fontainebleau, si aimée des peintres ; c’est par lui que les chênes prennent ces dimensions énormes et ces attitudes bizarres qui retiennent des mois entiers Rousseau, Diaz et Decamps au Bas Breau ; c’est lui qui dégage des amas de sable les roches singulières ; qui fait filtrer l’eau de diamant sous le velours des mousses ; qui fraye le chemin aux fourrés secrets, aux taillis mystérieux, aux perspectives inattendues ; qui écrase sous son talon la vipère à tète plate et entrouvre les branches pour laisser passer le chevreuil poursuivi.

Souvent l’artiste, sa boîte au dos, s’engage au hasard dans la forêt touffue et profonde. Les masses de verdure voilent l’horizon, les roches se dressent comme des murailles, le chemin aboutit à un fort impénétrable où les fauves peuvent à peine se glisser. Mais tout à coup une main invisible écarte le feuillage, entre deux troncs satinés et plaqués de velours vert, une étroite