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C’est pourquoi le cher homme n’avait pour lui que sa conscience, quelquefois inquiète devant elle-même, et ses pauvres joies dérobées, condamnées, solitaires, clandestines, empoisonnées par l’opinion. Il se ruinait ainsi fatalement, irrésistiblement ; et il allait toujours. Gomme à tous les missionnaires de malheur ou de’bonheur, une voix muette pour autrui lui criait : « Marche, marche ! » Cent cinquante kilomètres de chemins, et d’œuves sur terre et sous terre ! Mettons le mètre à 15 centimes, 150 fr. le kilomètre : total, 22, 500 fr. Ajoutons 20, 000 fr. pour publications, gravures, plans, cartes, planches, additions, raccords, refontes, bien loin certainement d’avoir été remboursés par le public promeneur, cet avare de dépenses utiles, qui rechigne quand on lui demande plus de dix sous pour un livre, et vous aurez 42, 500 fr., c’est-à-dire sa fortune, les épargnes de vingt ans ! Voilà ce que cet homme extraordinaire a mis d’argent dans sa passion douloureuse et touchante, afin quê la forêt de Fontainebleau fût pour tous pleine de charmes et sans fatigue, sans ennui, multipliée, animée, diverse, à prendre votre journée entière à pied et vous tenir toujours le cerveau d’accord avec les jambes. Et jamais, sachez-le, il ne fut en lui-même satisfait ni payé. Ses jouissances promises avortaient encore plus ou moins devant le regret