Page:Luchet, etc. - Fontainebleau, 1855.djvu/255

Cette page n’a pas encore été corrigée

que je tiens à réparer, autant pour vous que pour la vérité de l’histoire. Oui, la chose est sûre, ce barbet a existé. Je ne vous raconterai pas l’histoire du chien, mais celle de son maître, que j’appellerai le petit capitaine. La grande histoire, l’histoire-bataille, parlera assez des grands ; chacun son lot. Moi, je tiens à vous parler du petit capitaine ; d’autant plus qu’il était là, à cette heure solennelle des adieux, dans la grande cour de Fontainebleau, et il m’a fourni à ce sujet des détails que lui seul et Dieu connaissent, car il soupçonnait ce dernier d’y avoir mis la main.

Tous les genres de fidélité s’étaient donné rendezvous à Fontainebleau comme par hasard. Berthier luimême, Berthier, accusé le surlendemain de trahison, s’était juré de mourir enchaîné à son destin. Lourde et terrible chaîne ! car, tandis qu’il restait là, héroïque, devant le malheur, son cœur et sa pensée dévoraient l’espace et allaient se briser aux pieds d’une image adorée. Cette torture était consentie. II y a des heures dans la vie où l’on sacrifie l’amour à l’honneur. La souffrance était atroce ; n’importe ! il restait, il restait, cherchant à étouffer le vautour qui lui rongeait les entrailles. Il venait d’être témoin d’une de ces scènes qui, au lieu d’apaiser la sensibilité, ne font que l’irriter plus vivement. C’était lui qui s’était trouvé fatalement à l’arrivée d’une voiture de poste entrant bride abattue dans la cour du château, qui en avait ouvert la portière, et qui avait aidé à en descendre la belle comtesse