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au moins dans mon âge son explication, sinon son excuse. Emile avait convaincu la pauvre enfant, dont le courage n’avait pu longtemps résister à l’éloquence passionnée de celui qu’elle aimait. Le couple venait de s’asseoir au pied d’un hêtre magnifique, dont le feuillage épais semblait protéger la criminelle audace d’Emile, car Marie déjà ne disait plus monsieur Emile, mais bien Emile tout court… Le frais et gracieux visage de Marie s’était épanoui sous de chauds baisers, et la pauvre fleur allait être flétrie à jamais. Mon cœur battait aussi fort peut-être que ceux des amants ! Tout à coup, la jeune fille se lève effrayée, recule de quelques pas, pousse un cri de terreur, et de sa main, tremblante, montre à Emile une vipère que le bruit des baisers avait dérangée sans doute et qui s’enfuyait. En trois bonds elle traversa la route et se perdit dans les herbes et les ronces, au grand désespoir de mon second clerc, qui, d’abord étonné, furieux ensuite, avait couru pour écraser sous sa botte le reptile qui, plus vif, s’était dérobé à sa colère.

Emile revint à Marie.—Ce n’est rien, dit-il, ne vous effrayez pas comme cela, mon enfant… — Oh 1 partons, monsieur Emile, c’est un avertissement du ciel ! Partons ! — Et promenant autour d’elle ses regards craintifs : — J’ai si peur des vipèresl dit-elle en levant ses grands yeux noirs sur Emile furieux et penaud, partons ! — Celui-ci fit un mouvement comme pour enlacer la taille de Marie de ses bras amoureux ; mais