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homme qui l’avait autrefois adorée ! Alceste etCéliraène se promenaient sans le savoir dans la même rue, presque dans les mêmes jardins, l’un maudissant toujours le passé, l’autre lui souriant encore !

Un mur chancelant, une tenture de charmille déchirée, séparaient le bourreau et la victime, la coquetterie et la passion du temps passé : si la passion avait frappé sur le mur avec le bout de sa canne, si la coquetterie avait frappé sur le rideau de verdure avec le bout de son éventail, — quelle surprise, quelle honte, quelle tristesse, et sans doute quelle joie secrète, de se retrouver ainsi, bon gré, mal gré, aux rayons du soleil couchant ! Que de reproches, de confidences, de questions, de plaintes, de soupirs ! Mademoiselle Thévenin aurait bien ri, peut-être, en voyant pleurer ce revenant, ce fantôme de sa jeunesse ; mais j’imagine que la coquetterie repentante aurait fini par prêter son plus beau mouchoir de dentelle à la passion, au regret, à la jalousie, pour essuyer les dernières larmes d’un vieillard.

Le vieux misanthrope et la vieille coquette moururent l’an dernier, presque en même temps, le même jour : le fantôme d’Alceste poursuit l’ombre de Céliméne !