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reliques, ses tableaux, ses meubles, sa servante et son lévrier. Il semblait bien heureux d’une visite qui flattait sa faiblesse. Il ma remerciait à chaque instant d’avoir accepté son invitation, d’avoir donné au Chasseur d’ombres un compagnon crédule, qui daignait chasser avec lui.

Le temps était superbe, ce soir-là, pour la chasse aux ombres : un ciel doucement éclairé ; des nuages qui voilaient parfois les étoiles, pour leur prêter un peu de mystère ; des vapeurs légères, transparentes, qui passaient et s’agitaient dans toute la forêt ; une solitude attristante, presque terrible, et qui avait un charme secret ; un silence qui donnait des rêves à l’imagination ; de loin à loin, un murmure d’oiseaux qui n’avaient plus la force de chanter, pour avoir trop aimé pendant le jour-, çà et là, des caquetages d’arbres •encore tout verts, qui se moquaient des feuilles jaunes de leurs voisins ; dans les massifs, à travers la découpure du feuillage, des clartés capricieuses, qui ne faisaient que paraître et disparaître, comme si une puissance invisible avait voulu improviser des variations de lumière sur un rayon de la lune.

A sept heures, au seuil même de la forêt, Pierre Marcou me dit tout bas en ôtant son chapeau :

— Voici une ombre !

J’essayai de faire l’esprit fort et de railler ; je voulus rire… et, chose étrange ! je devins sérieux tout de suite ; je me laissai gagner par cette folie qui m’invitait