Page:Luchet, etc. - Fontainebleau, 1855.djvu/120

Cette page n’a pas encore été corrigée

Oh ! que j’aurais bien voulu être enfermé, ce soir-là, entre ces quatre murs dont je parle avec dédain. Le jour était mort ; je comptais sur la lune ; mais la lune ne devait se lever que le lendemain avec le soleil. C’est bien la peine d’avoir une lune ! Je ne demandai qu’une faveur au crépuscule, le dernier de ses rayons pour me montrer le bon sentier. J’aurais bien prié Dieu, mais j’avais peur d’offenser le démon ; à coup sûr, je marchais sur ses domaines, et je respecte toujours l’autorité régnante dans les pays que je visite. De pins en pins, de buissons en buissons, j’atteignis les limites de la terre végétale ; un arceau brisé dans sa clef de voûto était devant moi : c’était mon Rubicon ; je me recommandai aux patrons de l’alcôve de ma mère, et je franchis l’arceau. J’étais entré dans un puits, mais un puits assez large pour boire un jeune lac ; il y faisait presque jour, parce que le soleil avait tellement aiguisé ses rayons sur les immenses parois des rochers, que la fraîcheur de l’ombre n’avait pu éteindre encore tant de parcelles lumineuses incrustées pendant le jour : ce que je dis là est, je crois, une erreur en physique, mais je ne crois pas à la physique. Ce puits était forme de rochers circulaires à pic, comme un cotisée naturel ; à droite et à gauche, je voyais des galeries étagées, qui avaient l’air d’attendre des spectateurs ; après l’arceau, il y avait une jolie petite caverne tapissée de lierre, avec deux sièges proprement taillés : c’était comme un bureau pour déposer les cannes et les parapluies.