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LUCAIN.


Cependant elles fortifient leurs murailles de solides remparts, et de tous côtés les environnent de fossés profonds : elles disposent sur leurs tours élevées, les rochers arrondis et les traits qui accablent au loin l’ennemi. Le peuple penche vers Pompée, mais la terreur lutte contre sa fidélité. Ainsi, lorsque l’Auster au souffle tumultueux s’est emparé de l’Océan, il entraîne tous les flots. Qu’Éole entr’ouvre la terre d’un second coup de son trident et lance l’Eurus sur les flots soulevés, quoique poussés par un vent nouveau, c’est au premier qu’ils obéissent encore ; et quand l’Eurus orageux est seul maître du ciel, le Notus conserve l’empire de l’onde.

Mais la crainte pouvait aisément changer les esprits, et la fortune rendait leur foi douteuse. La fuite de Libon laisse l’Étrurie sans défense : l’Ombrien n’est plus maître sur ses terres depuis que Thermus(4) en est banni. Au nom de César, recule le jeune Slla, tjui ne fait pas la guerre civile sous les auspices paternels. À peine l’armée menace-t-elle les portes d’Auximon, que Varus(5) abandonne la ville et se précipite à travers les cités, les bois et les montagnes. Lentulus[1] est chassé d’Asculum. Le vainqueur le presse et gagne ses cohortes : de toute cette armée, le chef, resté seul, est en fuite, avec ses drapeaux sans soldats, ‘i’oi-même, Scipion[2], tu laisses déserte Lucerne

que tu devais défendre. Cependant ses murs renferment une vaillante jeunesse, qui depuis longtemps enlevée à l’armée de César, quand on craignait les Parthes, vint réparer au camp de Pompée ses perles dans les Gaules. Celui-ci, en attendant qu’il les rappelât pour la guerre, avait prêté à son beau-père cette partie du sang romain.

Corfinium et ses fortes murailles t’obéissent, belliqueux Domitius(6) : autour de tes enseignes sont les cohortes qui se placèrent autrefois devant Milon accusé. Aussitôt que Domitius voit s’élever dans la plaine un nuage immense de poussière, et les armes étinceler sous les rayons du soleil : — Amis, dit-il, courez au fleuve ; engloutissez le pont sous les flots. Torrent, descends tout entier de ces montagnes, amène-nous toutes tes vagues, emporte avec ton écume la charpente en débris. Qu’ici soit le terme de la guerre : que l’ennemi se repose et s’endorme sur cette rive. Fermons la barrière à ce chef sans frein. Pour nous ce sera vaincre, que d’avoir les premiers arrêté César, i Et sans retard il fait descendre des tours ses rapides bataillons. Mais en vain. César, à la tête de ses troupes, a vu de la campagne que la rivière affranchie va lui couper le passage. Sa colère s’est enflammée. — Eh quoi ! s’écrie-t-il, vos frayeurs n’ont-elles pas assez d’une muraille pour se cacher ? vous fermez la plaine et vous vous défendez avec des fleuves.

  1. Lentulus Spinther.
  2. Le fils de Scipion Nasica, passé par adoption dans la famille des Métellus.