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leur goût sanguinaire une partie de son âcreté. Je dois le croire du moins, en rapportant les paroles de Than-Sing qui causait avec eux : « Ils me disent qu’il vous aiment, parce que vous avez un doux visage et des yeux qui expriment la bonté, et ils ajoutent que maintenant ils n’ont plus le désir qu’il vous arrive du mal. » Devais-je croire que j’avais paralysé la barbarie de ces hommes, ou n’est-ce pas plutôt que l’habitude de me voir à toute heure du jour, ma faiblesse même, avaient été autant de motifs pour arriver à me traiter avec moins de rigueur ? D’un autre côté, leur cupidité me sauvegardait des excès de leurs instincts brutaux et cruels ; et quand je pense que j’ai vécu au milieu de ces hommes, seule et abandonnée, je ne puis en croire mes souvenirs.

Après être restée environ deux heures sur le pont, je rentrai de ma propre volonté dans ma cellule. Je ressentis une lassitude extrême, que je m’expliquais par la séquestration que j’avais subie les jours précédents. Je m’étendis sur mes planches ; elles me semblèrent moins dures qu’à l’ordinaire ; enfin, je ne sais pourquoi je ne me sentais pas aussi malheu-