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d’école dont le mari était huissier au ministère des Inventions Pratiques. Grâce à cette amie, négligée jusqu’alors, elle avait recueilli des renseignements précieux sur M. Prosper Benoît lui-même.

C’est ainsi qu’elle avait appris que le directeur, pour convoler en justes noces avec la douce et innocente Juliette Arnaud, devait rompre une ancienne liaison.

Prenant modèle sur d’illustres personnages, M. Benoît avait toujours célé sa véritable identité et ses fonctions officielles : son amie, laquelle d’ailleurs veuve et vivant de la petite fortune que lui avait laissée son mari, ne demandait à son amant que les secrets qu’il voulait bien lui confier.

L’huissier du ministère connaissait cette liaison, parce que l’huissier d’un ministère doit tout connaître afin de rendre les services de confiance qu’on attend de lui. Celui qui nous occupe était au courant des affaires personnelles de M. Prosper Benoît, de façon à pouvoir évincer l’amie du directeur si jamais celle-ci, avertie par un hasard extraordinaire, venait le demander à son bureau.

Depuis six ans donc Mme veuve Violet, née Léontine Briquet, était la maîtresse de M. Prosper Benoît, qui passait à ses yeux pour un honnête représentant de commerce.

Mme Vve Violet n’aurait jamais pu supposer un pareil machiavélisme de la part de son Prosper, car si le directeur, aux yeux de son amie, se nommait Niobet de son nom de famille, il continuait à se prénommer Prosper, ce qui évitait des complications.

Léontine était loin d’ailleurs d’être une femme désagréable.

C’était une jolie brune, de taille moyenne, assez forte, avant dépassé la trentaine, mais digne des attentions d’un homme amoureux. Le directeur s’en était accommodé parfaitement jusqu’au jour où il avait ressenti le coup de foudre pour « la petite Arnaud ».

Léontine était à cent lieues de prévoir la trahison de son amant. Aussi fut-ce avec le plus grand étonnement qu’elle reçut un jour sous enveloppe, la coupure d’un journal annonçant « le prochain mariage de M. Prosper Benoît, directeur au ministère des Inventions pratiques avec Mlle Juliette Arnaud.

— Pourquoi m’envoie-t-on ça ? dit-elle.

« Je ne comprends pas !… Je ne connais pas ces gens-là… Ni l’un, ni l’autre…

« Il faudra que je demande à Prosper.

Ce dernier incident, imprévu au programme tracé par Albert et ses amis, ne se produisit heureusement pas.

Mais il était dit que les dieux, et en particulier celui de