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sirent maintes fois jusque sous le consulta de César et de Bibulus ; et ils pouvaient devenir d’autant plus dangereux que la décision d’un consul était annulée par l’opposition de son collègue. D’un autre côté, la courte durée de leur magistrature les contraignait ou de brusquer une bataille pour en enlever la gloire à leur successeur[1], ou d’interrompre une campagne pour venir à Rome tenir les comices. Les défaites de la Trebia, de Cannes et celle de Servilius Cæpion par les Cimbres[2] furent des exemples funestes du défaut d’unité dans la direction de la guerre.

Afin de pallier les mauvais effets de l’exercice simultané de leurs prérogatives, les consuls convinrent qu’en campagne ils alterneraient journellement dans le commandement, et qu’à Rome chacun aurait les faisceaux pendant un mois ; mais cette innovation eut encore des conséquences fâcheuses[3]. On crut même devoir, neuf ans après la chute des rois, recourir à la dictature ; et cette autorité absolue, limitée à six mois, c’est-à-dire à la plus longue durée d’une campagne, ne remédiait que temporairement, et dans les circonstances extraordinaires, à l’absence du pouvoir d’un seul.

Ce dualisme et cette instabilité de l’autorité suprême n’étaient donc pas un élément de force ; l’unité et la fixité

    qu’ils perdent les moments en querelles plutôt plutôt qu’en délibérations… » (Tite-Live, XXII, xlv.)

  1. Tite-Live, XXI, lii. — Dion-Cassius, Fragments, CCLXXI, édit. Gros.
  2. Tite-Live, XXI, lii.
  3. Dans l’armée romaine les deux consuls jouissaient d’un pouvoir égal, mais la déférence d’Agrippa, en concentrant l’autorité dans les mains de son collègue, établit cette unité si nécessaire au succès des grandes entreprises. » Tite-Live, III, lxx.) — « Les deux consuls commandaient souvent tous les deux le jour de la bataille. » (Tite-Live, Bataille du mont Vésuve, VIII, ix ; Bataille de Sentinum, X, xxvii.) — « Innovation funeste ; dès lors chacun eut en vue son intérêt personnel et non l’intérêt général, aimant mieux voir la République essuyer un échec que son collègue se couvrir de gloire, et des maux sans nombre affligèrent la patrie. » (Dion-Cassius, Fragments, LI, édit. Gros.)