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Africain de grande naissance, Masintha, son client, qu’il avait défendu récemment à Rome, avec une extrême ardeur, et caché dans sa maison après la condamnation[1], pour le soustraire aux persécutions de Juba, fils d’Hiempsal, roi de Numidie.

On raconte qu’en traversant les Alpes, César s’étant arrêté dans un village, ses officiers lui demandèrent en riant s’il croyait qu’il y eût même dans ce coin de terre des brigues et des rivalités pour les emplois. Il répondit sérieusement : « J’aimerais mieux être le premier parmi ces barbares que le second dans Rome[2]. » On répète cette anecdote, plus ou moins authentique, comme une preuve de l’ambition de César. Qui doute de cette ambition ? L’essentiel est de savoir si elle était légitime, si elle devait s’exercer pour le salut ou pour la ruine du monde romain. N’est-il pas plus honorable, après tout, d’avouer avec franchise les sentiments qui nous animent que de cacher, comme Pompée, l’ardeur du désir sous l’apparence du dédain ?

Arrivé en Espagne, il leva promptement, dix nouvelles cohortes, qui, jointes aux vingt autres déjà dans le pays, lui donnèrent trois légions, forces suffisantes pour pacifier bientôt la province[3]. La tranquillité en était sans cesse troublée par les incursions des habitants du mont Herminium[4], qui ravageaient la plaine. Il exigea d’eux qu’ils vinssent s’y établir : ils refusèrent. César alors commença une rude guerre de montagnes et parvint à les soumettre.

  1. Suétone, César, lxxi.
  2. Plutarque, César, xii.
  3. Plutarque, César, xii.
  4. Chaîne de montagnes du Portugal, appelée aujourd’hui serra da Estrella, et qui sépare le bassin du Tage de la vallée du Mondego. D’après Cellarius (Géographie antique, I, lx), le mont Herminium s’appelle encore Arminno. L’oppidum principal des populations de ces montagnes paraît avoir été Medobrega (Membrio), dont il est fait mention dans les Commentaires de César, Guerre d’Alexandrie, xlviii.