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mille, de la religion, de la propriété ; le gouvernement, sur l’élection ; la politique, sur la conquête. À la tête de l’État est une aristocratie puissante, avide de gloire, mais, comme toutes les aristocraties, impatiente de la royauté, dédaigneuse de la multitude. Les rois s’efforcent de créer un peuple à côté de la caste privilégiée, et introduisent des plébéiens dans le sénat, des affranchis parmi les citoyens, et la plupart des citoyens dans les rangs de la milice.

La famille est fortement constituée : le père y règne en maître absolu, seul juge[1] de ses enfants, de sa femme, de ses esclaves, et cela durant toute leur vie ; cependant le rôle de la femme n’est pas avili comme dans les sociétés barbares : elle entre en communauté de biens avec son mari ; maîtresse dans sa maison, elle a le droit d’acquérir, et partage également avec ses frères l’héritage paternel[2].

La base de l’impôt est la base du recrutement et des droits politiques ; il n’y a de soldats que les citoyens ; il n’y a de citoyens que ceux qui possèdent. Plus on est riche et plus on a de pouvoir et de dignités, mais plus on a de charges à supporter, de devoirs à remplir. Pour combattre comme pour voter, les Romains se divisent par classes suivant leur fortune, et, dans les comices comme sur le champ de bataille, les plus riches sont aux premiers rangs.

Initié aux pratiques apparentes de la liberté, le peuple est contenu par la superstition et le respect pour les hautes classes. En faisant intervenir la divinité dans toutes les actions de la vie, on idéalise les choses les plus vulgaires, et on apprend aux hommes qu’au-dessus des intérêts maté-

  1. « Chez les Romains, les enfants ne possèdent rien en propre du vivant de leur père. Celui-ci peut disposer non-seulement de tous les biens, mais même de la vie de ses enfants. » (Denys d’Halicarnasse, VIII, lxxix ; II, xxv.)
  2. Denys d’Halicarnasse, II, xxv, xxvi. — « Dès l’origine, dit Mommsen, la famille romaine présentait, par l’ordre moral qui régnait entre ses membres et leur subordination mutuelle, les conditions d’une civilisation supérieure. » (Histoire romaine, 2e édit. I, p. 54.)