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que celui-ci défendit plus tard. Doué d’une haute intelligence, d’une rare énergie, Catilina ne pouvait méditer une chose aussi insensée que le massacre et l’incendie. C’eût été vouloir régner sur des ruines et des tombeaux. La vérité se présentera mieux dans le portrait suivant, tracé par Cicéron, sept ans après la mort de Catilina, alors que, revenu à une appréciation plus calme, le grand orateur peignait sous des couleurs moins sombres celui qu’il avait tant défiguré : « Ce Catilina, vous n’avez pu l’oublier, je pense, avait, sinon la réalité, du moins l’apparence des plus grandes vertus. Il faisait sa société d’une foule d’hommes pervers, mais il affectait d’être dévoué aux hommes les plus estimables. Si, pour lui, la débauche avait de puissants attraits, il ne se portait pas avec moins d’ardeur au travail et aux affaires. Le feu des passions dévorait son cœur, mais il avait aussi du goût pour les travaux guerriers. Non, je ne crois pas qu’il ait jamais existé sur la terre un homme qui offrit un assemblage aussi monstrueux de passions et de qualités si diverses, si contraires et en lutte continuelle[1]. »

La conjuration, conduite par l’esprit aventureux de son chef, avait pris un développement considérable. Des sénateurs, des chevaliers, de jeunes patriciens, un grand nombre de citoyens notables des villes alliées, y participaient. Cicéron, instruit de ces menées, réunit le sénat au temple de la Concorde et lui fait part des renseignements qu’il avait reçus ; il lui apprend que le 5 des calendes de novembre un soulèvement devait avoir lieu en Étrurie, que le lendemain une émeute éclaterait dans Rome, que la vie des consuls était menacée, que partout enfin des amas d’armes de guerre et des tentatives pour embaucher des gladiateurs indiquaient des préparatifs effrayants. Catilina, interpellé par le consul, s’écrie que la tyrannie de quelques hommes, leur avarice,

  1. Cicéron, Discours pour M. Cælius, v. Ce discours fut prononcé en l’an 698.