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Conjuration de Catilina.

V. Catilina, dont il a déjà été question, avait échoué deux fois dans ses prétentions au consulat ; il le brigua de nouveau pour l’année 692, sans abandonner ses projets de conjuration. Le moment semblait favorable. Pompée se trouvant en Asie, l’Italie était privée de troupes ; Antonius, affilié au complot, partageait le consulat avec Cicéron. Le calme existait à la surface, cependant des passions mal éteintes, des intérêts froissés, offraient au premier audacieux de nombreux moyens de perturbation[1]. Les hommes que Sylla avait dépouillés, comme ceux qu’il avait enrichis, mais qui avaient dissipé les fruits de leurs immenses rapines, étaient également mécontents ; de sorte que l’on voyait s’unir dans la même pensée de bouleversement et les victimes et les complices de l’oppression passée.

Porté aux excès de tout genre, Catilina rêvait, au milieu des orgies, le renversement de l’oligarchie ; mais il est permis de douter qu’il voulût mettre tout à feu et à sang, comme le dit Cicéron, et comme l’ont répété, d’après lui, la plupart des historiens. D’une naissance illustre, questeur en 677, il s’était distingué, en Macédoine, dans l’armée de Curion ; il avait été préteur en 686, et gouverneur de l’Afrique l’année suivante. On lui reprochait d’avoir, au temps de sa jeunesse, trempé dans les meurtres de Sylla, de s’être associé aux hommes les plus mal famés, et rendu coupable d’incestes et d’autres crimes : il n’y aurait aucune raison de l’en disculper, si l’on ne savait combien les partis politiques qui triomphent sont prodigues de calomnies envers les vaincus. D’ailleurs, il faut bien en convenir, les vices dont on se plaisait à le charger lui étaient communs avec beaucoup de personnages de cette époque, entre autres avec Antonius, collègue de Cicéron,

  1. « C’était au point qu’il ne fallait plus pour renverser le gouvernement malade qu’une légère impulsion du premier audacieux venu. » (Plutarque, Cicéron, xv.)